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De
curieux paysages dans lesquels les plans s'étagent et où l'ocre des
champs déploie ses parallèles, un univers minéral aux senteurs de
terre chaude, qui retient
dans ses masses la boule d'un pin, le cube
d'une ferme, des ciels où vont mourir des orages dociles .
Ou
alors, c'est un lac posé entre deux nuits, à la frange
duquel palpite la présence discrète de frondaisons dorées,
évanescentes, essorées par un vent mystérieux venu d'un
autre monde. Quand c'est une nature ( dîte ) morte, les
objets sont posés là, comme avec désinvolture ; mais l'œil
perçoit vite la précision diabolique avec laquelle la
tension s'établit, circule, s'épanche, littéralement fait le
tableau. Pas de hasard ici. Que des rendez-vous .
Des
contacts où les forces passent et où l'on rencontre le
visuel le plus insolent.
C'
est une peinture moderne, à moins qu'elle ne soit
intemporelle, en dépit de sa platitude affirmée. On pense à
de Staël, à Matisse et à l'émule américain de ce dernier, le
grand Milton Avery. Dans l'approche de Karas toutefois, nul
parti pris, aucune tentative de prouver quoi que ce soit, de
faire une leçon.
Le
peintre nous invite à caresser de l'œil ses constructions, à
errer nonchalamment dans une mélodie de paysages que nous
avons rêvés. C'est une musique aux rythmes tendres,
superposés, juxtaposés, embrassés sans être chaotiques,
dépouillés sans être pauvres, fluide et religieuse.
L'harmonie chromatique, les lignes aussi, s'affirment mais
sans recherche ostentatoire, avec cette infinie douceur qui
dénote la force.
Quant
au timbre, cet instrument, ce médium que Karas manipule,
c'est un passage d'huile sur fond d'acrylique comme si, sur
une base solide, l'artiste pouvait encore mieux faire
semblant d'être étourdi.
Karas articule de subtils " structures " ( c'est un gros
mot…) mais il a bien compris que la sacro-sainte structure
n'est rien sans la sensualité. Le tableau irréprochable ne
serait que parfait, quelle tristesse, sans humour, la
tendresse et la joie de vivre.
Cette
quête de l'épure, sérieuse et d'une technique impeccable ne
se prend jamais au sérieux. Tout, dans ses toiles est
calibré, mesuré, mais tout, aussi, est induit, suggéré dans
le cadre d'une vision du monde sereine et d'un optimiste
communicatif.
Oui,
l'art de Karas est cérébral, construit, ordonné. Mais GOETHE
ne disait-il pas " L'art c'est l'art parce que ce n'est pas
la nature ". C'est un art
pensé mais qui, pour notre plus grand plaisir, reste
toujours profondément humain.
Texte de C.COMANZO, écrivain et professeur à l'Université de
Bourgogne ( Dijon ) |
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